9 – Poème : 1959 c’était hier, c’est encore aujourd’hui … L’écrit contre l’oubli poème de Claudie – Évocations après les retrouvailles poème de Madame Broche et Piqure de Rappel – Pensée de mon ami André Marsan
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1959 c’était hier, c’est encore aujourd’hui…
L’année de mes vingt ans.
Je vivais alors ma jeunesse, des jours éblouissants.
C’était le bel âge pour rêver à un avenir étincelant.
Consciencieux, appliqué, travailleur intransigeant,
J’avais commencé à œuvrer dès mes études terminées
Pour soulager mes parents dans la difficulté.
Prévoyant mais aussi insouciant, je dois ici l’avouer,
Je voyais les jours s’écouler avec une très grande rapidité,
Quant au mois de mai, je fus appelé à participer
A cette guerre stupide à laquelle je ne pouvais adhérer :
L’Algérie, je l’avais complètement oubliée,
Ce destin inattendu m’envoyait vers cette contrée.
Adieu père, mère, sœurs, grand-père et grand-mère,
Adieu ma France, adieu ma fiancée, adieu mes amis,
adieu mes frères.
Quelque chose me disait que ce n’était pas un au revoir,
Eux, ne pouvaient retenir leurs larmes qui trempaient leur mouchoir.
Nîmes, Montpellier, Marseille, la Méditerranée,
Toute une nuit sur le «Ville d’Alger».
Quel déchirement sur ce bateau en partance
Qui m’éloignait loin des lumières de France.
Etape à Alger puis Orléansville, mais où était donc ma destinée,
Quel sort m’était réservé, où serai-je affecté.
Dans mes rêves d’homme-enfant conçus pour mille lendemains,
Où était donc mon avenir sur ce chemin.
Les heures s’écoulaient, l’angoisse me torturait.
Dans ce camion qui traversait le djebel personne ne parlait.
Difficile de ne pas pleurer lorsque le souvenir apparaît.
Nous étions tous épuisés, exténués mais aucun ne l’exprimait.
A l’âge des flirts et des «Je t’aime»,
Pourquoi nous obliger à cette haine.
C’est finalement «Paul Robert», petit village du Haut Dahra,
Qui m’accueille. Je suis au 18ème RA.
Non, je ne vais pas ici faire le récit de 28 mois passés,
Trop difficile à exprimer, trop pénible est d’en parler,
Mon blog peut en témoigner,
Je peux le certifier.
Alors, écrire ce vécu…
Jamais je ne pourrai recommencer, soyez en convaincus.
Je suis revenu
Alors que d’autres, nombreux, ont disparu.
De simples numéros, pauvres héros sans nom,
Ils n’étaient que des matricules qui combattaient sans galons,
Évanouis dans les brumes de la guerre,
Tombés au champ d’honneur, ils sont morts solitaires.
Aujourd’hui, même si la page est tournée,
Réconfortant est de constater que plus de cinquante ans après,
Anciens du 18ème RA
Et résidents de là-bas
Se retrouvent chaque année
Pour évoquer le passé et les souvenirs jamais oubliés.
L’appelé du 18°RA.
La légende du Myosotis
Ne m’oubliez pas (Forget me not)
Petite histoire du myosotis
Myosotis en grec veut dire “oreille-de-souris”.
C’est un des nom donné à cette fleur.
Un nom que je trouve gracieux, ravissant, coquet
et qui s’explique par la charmante rondeur de ses pétales.
Sachez que cette petite fleur bleue a une légende :
Une dame et son chevalier
se promenaient amoureusement le long d’une rivière.
Quand il se pencha pour lui cueillir un Myosotis,
il perdit l’équilibre à cause de son armure,
tomba à l’eau
mais avant de se noyer
lança la fleur à sa belle en criant “ne m’oubliez pas”.
Cette phrase pour désigner la fleur.
Ici, pas de légende,
juste à regarder la finesse de la dentelle,
la beauté suranné de la composition
et le tendre bleu des myosotis.
Hélas, dans un tout autre registre,
il est devenu depuis 2002 en Belgique
l’emblème de la journée internationale des enfants disparus.
Chaque année, depuis 1983,
elle est fixée au 25 mai
par le président des Etats Unis .
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Poème de Claudie
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L’écrit contre l’oubli
Écrire c’est crier en silence, je l’ai fait ici passionnément.
Transcrit d’une plume sans feinte spontanément,
J’ai pu évacuer la douleur d’un cœur lourd d’un trop long silence
Où je m’étais réfugié toutes ces années en somnolence.
Enfin, un jour, le voile à disparu pour me délivrer de mes tourments
Comme le gardien des secrets sur un écho d’autrefois en lui dormant.
L’espoir comme l’amitié n’abdique jamais, l’émoi toujours grandit en notre cœur.
Il se mêle au sublime concert en messages du langage afin que jamais ne meure
Pour me pencher sur mes amis inconnus dans cette terre obscure
Que la souffrance anonyme et l’innombrable fossé de tortures
Rappelle à mon cœur ce songe de détresse
D’un passé douloureux de sanglots éperdus qui m’oppresse.
Les jours passés ont ressoudé les mailles sur le temps.
La terre en ce pays vit désormais sous un soleil éclatant.
Quand somnole encore les âmes au tombeau
Avec pour seule victoire, à la première aube le chant d’un passereau.
Claudie
Le Temps n’est qu’un instant présent
qui oublie le passé ne saurait comprendre l’avenir. Citation Sénèque.
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Poème de Madame Broche
Évocations après les Retrouvailles
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Quitter la France
Dans les années 58, 59, 60…
Pour découvrir l’Algérie,
Loin des parents, des amis…
Quelques moments de solitude
Mais aussi d’inquiétude.
Et, chaque jour, obéir,
Mûrir et … s’épanouir !
Après des temps difficiles,
Voici, enfin, « la quille » !
Le retour tant attendu,
Le passé proche a vécu.
Des années passent…
Les heures sombres s’effacent.
Par Internet on se retrouve,
On se souvient, on se découvre.
Les souvenirs affluent,
Les liens amicaux perdurent…
Par André Dumas fuse la joie,
Quand sont réunis 1/18 RA et villageois.
Que cette bonne initiative,
Dans l’avenir se poursuive !
Au fil du temps on apprécie
Ces retrouvailles entre ami (e) s…
Marguerite BROCHE
A l’intention d’André Dumas et des Appelés du 1/18° RA
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Pensée de mon ami André Marsan
…Algérie Paul Robert.
Piqure de rappel
Pans de vie, les souvenirs me semble t-il, ne doivent pas être uniquement des documents qui se dépoussièrent allègrement…
A divers degrés de sollicitations, ces acquits du temps passé sont contemporains de nos existences : principaux ou secondaires ils sont ces petits cailloux blancs qui nous font retrouver le chemin de l’explication par les voies de l’apaisement.
L’opportunité qui m’est offerte aujourd’hui dans cette rencontre me permet d’espérer le croisement de nos témoignages les plus affectueux.
L’antériorité des événements qui ne peut et ne doit pas provoquer l’oubli me fait à nouveau répéter cette vieille maxime : “Que ceux qui savent… se souviennent ! et que ceux qui ne savent pas… apprennent ! “
Concernant le Haut-Dahra et ma récente incorporation, telle une aide à mon dépaysement, il demeure en moi l’image brillante des cigognes de Paul-Robert, des eucalyptus et de cette population rurale de vignerons qui nous accueillait chez eux comme un des leurs.
Faisant abstraction du plus terne des faits, je me prends à rêver et laisse s’enfuir par la cage faussement entr’ouverte mes sentiments humains patriotiquement inchangés.
Avec le push des Généraux qui venait d’être étouffé, les européens jusqu’aux plus réticents allaient devoir fuir à tout jamais ce continent.
Paradoxalement, reflétant cette antériorité, seules les tombes du cimetière seront là pour témoigner.
Quelle efficacité pouvait alors déployer l’armée face à la précipitation extrême d’un conflit aussi “mouvant” et dangereux qu’une guerre civile !
Les 23000 morts militaires du contingent, furent-ils utiles ou inutiles (!)
Parmi les conséquences de la tromperie du : “JE VOUS AI COMPRIS !”, les “bidasses” du contingent quelques mois après, eurent la fonction moralement difficile d’assister la détresse des survivants. Ce fut sous le sceau de la douleur et en vision directe sur les “chicayas entre GPRA et FLN se disputant la maîtrise du nouvel État, que j’eus mes 20 ans profondément marqués. En effet, les conséquences mortifères du slogan “ la VALISE ou le CERCUEIL” me firent prendre de l’âge et rider mon front face à cet impossible partage !
Et que dieu me pardonne si l’obsession à vouloir retrouver ma Garonne, mes peupliers et ma vie civile estompait la gravité des faits.
Toutefois, dépendant de la chronologie bancale (!) des accords d’Évian, à titre “Post-curseurs”, nos aides aux ”exclus” jusqu’au port d’Alger, allaient traverser les phases d’une détresse que mon immaturité ne pouvait soupçonner jusqu’alors.
Dans cette même gravité, qu’est-il advenu des harkis et de leurs familles estampillés indésirables sur l’hexagone par “Mesmer” et abandonnés là !
Avec les ans en plus, plus que jamais aujourd’hui et pour la première fois, mon désir sera d’exhumer ma longue plainte en m’ouvrant d’avantage, et en m’excusant de n’avoir pas fait plus que ce que nous devions faire.
Nullement bonifiés, les faits resteront les faits, et à cela nous n’y pouvons rien.
Mettant à l’index les phases inutilement vexatoires, sur la grève je veux rester ce petit caillou blanc et marquer la direction de ce chemin où j’ai vu pleurer tant de gens.
Hors du “voyeur indélicat” que je ne veux pas être, je ne laisserai sortir mes souvenirs que bien accompagnés disais-je en d’autres temps.
Dans l’art de la tourmente, si j’appréhende et lutte contre le sommeil, c’est pour ne pas y rencontrer les rêves mauvais.
En cet avril 2017, pour un épanchement qui restera assurément partiel.
André MARSAN. Respectueux rappel à Claude mon meilleur ami lâchement assassiné en juillet 63 !!
André MARSAN. 61/1B (Paul-Robert, El Marsa Ténès, Orléansville, Alger, Montenotte, la ferme Décaillé, Tigzirt sur mer, Dellys)
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